Tambours et Fifres

1. Introduction

Les Marches de l'Entre-Sambre-et-Meuse sont rythmées par le son aigrelet du fifre et le son sourd des tambours. Ce mélange donne au folklore sa personnalité, son âme. Tout marcheur entendant une batterie a son cœur qui vibre d'émotion. Afin de mieux comprendre cette étrange alchimie, ce texte explique la composition d'une batterie, son fonctionnement et le rôle de chacun, ainsi que l'origine et les différentes parties du répertoire actif.

2.Composition d'une batterie moyenne

2.1. Le tambour-major

Il précède de quelques mètres les tambours et les fifres. A l'aide de sa canne, il montre la cadence à tenir ainsi que la fin d'une marche.

2.2. Le fifre

Il se trouve à la droite des tambours. Il joue les mélodies des marches. L'instrument est basé sur la gamme de ré et comporte deux octaves et demi. Notons que l'octave la plus grave n'est pas utilisée car le but du fifre est de "percer" les tambours, c.à.d. qu'il doit réussir à dominer la voix de ceux-ci.

2.3. Les tambours

Les cinq ou six tambours rythment la mélodie du fifre. L'instrument est composé de deux peaux de bêtes montées sur un fût de cuivre jaune et tendues par une corde munie de tirants en cuir. La peau du dessous, dite de timbre, la plus fine, est surmontée d'un timbre en boyau tordu, donnant au tambour un son caractéristique.

3.Le fonctionnement d'une batterie

3.1. Le premier tambour

Dans une batterie, le personnage le plus important n'est pas, comme on pourrait le penser, le tambour-major, mais bien le premier tambour. Celui-ci se place juste à côté du fifre au premier rang et possède une certaine expérience. C'est lui qui décide ce que l'on va jouer en accord avec le fifre et qui crie la marche suivante durant le temps mort qui suit le tournement de canne du tambour-major, excepté lorsque ce dernier demande lui-même, par un mouvement de canne particulier, une marche bien précise (c'est le cas pour La grande , le Pas ordinaire , le Pas de route et le Pas de charge ).

3.2. Le système de redoublage

Le redoublage consiste, pour les tambours, à meubler tous les silences par des coups exécutés plus rapidement. Cela donne libre court à la fantaisie du redoubleur, qui peut exploiter toute sa technique. Lorsqu'un tambour redouble, les autres jouent la marche "en simple", ce qui veut dire le thème de base de la marche jouée. Le redoublage se fait à tour de rôle, en commençant par le premier tambour. On redouble le thème de la marche une fois. Une fois le thème joué, le tour passe à celui qui se trouve à gauche. On change également de redoubleur lorsqu'une marche se termine.

Notons que chaque tambour donne une certaine marque personnelle à son redoublage. C'est pour cette raison que les partitions de tambour n'existent pas. Si c'était le cas, la musique perdrait son originalité et son côté folklorique, puisqu'elle serait alors codifiée.

Tout comme le redoubleur, chaque fifre a sa version personnelle d'une marche. Le thème de base reste évidemment le même, mais il y ajoute certaines variations personnelles.

4.Le répertoire

4.1. Origines

En tout, il existe une bonne soixantaine de marches, provenant d'origines différentes :

1° La plupart des marches ont été composées par des musiciens de la région. Elles sont appelées traditionnelles.

2° La série des marches dites des Hollandaises tirent leur origine des airs de tambours et fifres joués au début du XIXe siècle par l'armée des Pays-Bas, qui avait envahit nos contrées à l'époque.

3° Les Françaises sont appelées ainsi du fait que ce sont d'anciennes chansons de route de l'armée française, comme par exemple Auprès de ma blonde.

4°Un certain nombre de marches sont tirées directement du répertoire de la musique de la Garde Impériale du premier empire. Elles sont fort peu jouées mais ont néanmoins un côté majestueux.

4.2. Cadences

1° Le pas accéléré regroupe la plupart des marches, dont les marches à solo. Ces dernières comportent un solo de fifre, toujours précédé d'un ou plusieurs coup(s) de tambour appelé Ra, d'où leur nom (1 Ra, 3 Ras, ...)

2° Le pas ordinaire est un pas beaucoup plus lent, qui se joue en des lieux solennels comme l'église ou les monuments. On y entend très bien le redoubleur car la partition simple est assez dépouillée. C'est dans des marches comme celle-ci que l'on peut reconnaître les bons tambours. Il en est de même pour les pas de charge et le pas de route.

3° Le pas de charge est le plus rapide. Il est joué dans les campagnes et est reconnaissable à sa succession de Flas.

4° Le pas de route sert d'intermédiaire entre le pas de charge et le pas accéléré. Il est également joué dans les campagnes.

N.B. : Pour les trois derniers pas, la partition simple du tambour ne varie pas. Seul le fifre change son chant. A ce moment, le redoublage change de main également.

4.3. Les ordonnances

Le réveil : se joue tôt le matin afin de rappeler aux marcheurs et habitants que le grand jour est arrivé.

L'appel : comme son nom l'indique, appelle les marcheurs à se rendre au lieu de rendez-vous

Au drapeau : se joue pour rendre les honneurs au drapeau

Le rigodon se joue à l'arrêt pour rendre les honneurs, souvent après une décharge ou une remise des médailles

La retraite : se joue durant la retraite (souvent aux flambeaux), se déroulant en fin de journée.

4.5. Les arguedennes

Lorsqu'une batterie est à l'arrêt, il n'est pas rare que le fifre entame un air connu (une valse, un rock, etc.) afin de donner une ambiance de bonne humeur et tout-à-fait particulière, unique en son genre. Un tambour fait alors office de petite caisse et un autre de grosse caisse en maintenant son timbre.

Propos recueillis de Mr. Christophe VANDERSMISSEN

Les fanfares et harmonies

1. Introduction

L’un des atouts majeurs qui font la beauté de notre folklore reste la présence permanente de musique. Si les batteries de tambours permettent aux pelotons d’avancer au pas et en cadence, les diverses phalanges musicales rehaussent le prestige de nos escortes tout au long des festivités et plus particulièrement lors des moments importants.

2. Qui sont ces groupes ?

Ce sont des ensembles de musiciens avant tout amateurs, qui y trouvent camaraderie et convivialité. A l’origine, ils habitaient le village mais aujourd’hui certains se déplacent de loin pour faire vivre leur société de musique. Pour une grande majorité d’entre elles, les phalanges musicales ont un fort passé régional. Elles revendiquent une histoire de plus d’un siècle et demi et sont bien implantées dans le folklore de leur village. Bien entendu, elles sont en activité tout au long de l’année et proposent concerts et animations diverses. En d’autres termes, ces ensembles sont certes représentés dans les marches, mais aussi dans la vie de leurs localités été comme hiver.

3. Une tendance répandue et persistante

Si de nos jours nous pouvons constater un déclin des ensembles musicaux « de village », notre folklore préserve ces traditions et incite les jeunes à commencer la musique. A l’époque, il était d’ailleurs courant que les fanfares et harmonies dispensent leurs propres cours de musique pour recruter de nouveaux membres. Désormais ce rôle est plutôt réservé aux académies, où les professeurs sont bien souvent avertis de notre folklore. A l’heure actuelle, on dénombre une vingtaine d’ensemble musicaux différents en Entre-Sambre-et-Meuse. Beaucoup d’entre eux participent non seulement à la Marche de leur village mais bien souvent à d’autres processions non loin, de façon à satisfaire la demande nombreuse et croissante. Ainsi s’ajoutent parfois les musiciens qualifiés de « mercenaires ». Ce sont des groupes indépendants qui ne se forment que pour effectuer la prestation, sans lien véritable avec le village concerné.

4. Répertoire

Naturellement, les harmonies-fanfares adoptent le registre militaire lors de nos marches. Toutefois, à la différence des tambours et fifres, les morceaux sont souvent bien plus récents et émanent parfois des musiques militaires actuelles. Ils sont aussi très variés : marches belges, françaises, allemandes, anglaises ou américaines se font entendre et sont appréciées tant des marcheurs que du public.

5. Moments forts

Rentrée, messe, passage dans un lieu particulier… Les processions de nos villages sont constellées de moments importants, qu’il nous faut mettre en musique. Pour les moments religieux ou les passages devant des chapelles, on préférera des marches de procession (plus lentes et moins claironnantes). Elles peuvent être associées au pas ordinaire puisque jouées dans les mêmes circonstances. Les offices religieux sont souvent accompagnés de morceaux divers mais adaptés, dont le choix incombe au chef de musique. Le reste du temps, le répertoire militaire classique est employé et souligne notamment la rentrée solennelle, moment de fierté attendu par tous les marcheurs qui paradent jusqu’à l’église.

6. Les arguedennes

Les arguedennes (surnommées les « guènes ») sont de petits morceaux d’ambiance joués lors des arrêts et des instants plus festifs. C’est un plaisir partagé qui réjouit autant les musiciens que les mélomanes. Airs traditionnels, chansons populaires ou à la mode, il y en a pour tous les goûts et tous les styles.

a. Fonctionnement

« Jouer des arguedennes », c’est avant tout un moment de partage. Un premier musicien entonne un air seul, et les autres le suivent dès qu’ils l’ont reconnu. Chacun s’écoute et apporte une voie différente pour obtenir un ensemble cohérent et mélodieux.

b. Utilité

Cette pratique est fondamentale, car elle permet de conserver un patrimoine musical et régional énorme sans qu’il tombe dans l’oubli. Les mélodies sont apprises « à l’oreille » (par cœur) et transmises, parfois sur des générations. Les arguedennes mettent l’ambiance et colorent les moments de fête populaire qui encadrent nos processions.

Propos recueillis de Mr. Ulys FAIETA



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